Sélection de la langue

Recherche

Une banque est accusée d'avoir fourni au service de police des photos de surveillance de la mauvaise personne

Résumé de conclusions d'enquête en vertu de la LPRPDE no 2002-53

[Principes 4.6 et 4.6.1 de l'annexe 1]

Plainte

Une femme s'est plainte qu'une banque ait communiqué des renseignements personnels inexacts la concernant. En particulier, elle prétendait que la banque avait communiqué au service de police deux photos d'elle tirées d'une bande vidéo de surveillance, qui ont ensuite été publiées dans un article de journal l'identifiant comme soupçonnée d'un crime.

Résumé de l'enquête

En réglant une facture à une banque où elle n'avait pas de compte, la plaignante a été filmée par une caméra de surveillance. Le même jour, au même guichet de la banque, une personne a encaissé deux chèques présumés volés. Pour aider le service de police municipal à mener son enquête, le personnel de sécurité de la banque a examiné la bande vidéo et a produit deux photographies de la plaignante debout devant le guichet. Indiquant que ces photographies représentaient l'auteur du crime, la banque les a remises à la police, qui en a à son tour remis des copies à l'organisme Échec au crime. Les photographies ont ensuite accompagné la chronique « Crime de la semaine » dans le quotidien local. La chronique décrivait le crime et désignait la personne illustrée comme soupçonnée d'y avoir participé.

La bande journal d'une banque est une archive centrale informatisée de toutes les transactions, et de l'heure à laquelle elles ont eu lieu, pour chacun des guichets. Le jour du crime, l'horloge de la caméra de surveillance était à la bonne heure, mais l'horloge de la bande journal de la banque avait 12 minutes de retard. La transaction de la plaignante à la banque avait précédé d'environ 12 minutes l'encaissement des chèques volés. Donc, lorsque le personnel de sécurité a avancé la bande vidéo jusqu'à l'heure de l'encaissement indiquée par la bande journal, c'est l'image de la plaignante, et non celle du présumé criminel qui est apparue. La banque, qui n'a pas détecté le problème de synchronisation des deux horloges, est donc à l'origine de l'erreur.

Une semaine après la chronique initiale, Échec au crime a corrigé l'erreur en publiant une rétractation dans le même quotidien. Le journal a aussi publié, en page frontispice, un article précisant que la plaignante avait été la victime d'une erreur sur la personne. Cependant, de nombreuses personnes avaient entre-temps reconnu l'image de la plaignante parue dans le premier article. Plusieurs amis et membres de sa famille l'avaient appelée pour s'informer de ses problèmes avec la police et la plaignante s'était rendu compte que certaines de ses connaissances commençaient à douter de sa moralité. Étant d'avis que sa bonne réputation était essentielle à sa capacité d'obtenir du travail dans les résidences et les lieux de travail de ses clients, la plaignante s'inquiétait sérieusement de ce que cet incident pourrait faire à sa réputation et à son entreprise et était extrêmement contrariée qu'on ait laissé peser des soupçons sur elle pendant une semaine entière. Elle était aussi désireuse de savoir si ces photographies avaient paru dans d'autres avis d'Échec au crime.

Le Commissariat a pu la rassurer : les photographies n'avaient paru que dans un seul article de journal. La plaignante a reçu des excuses officielles de la banque, la police municipale et d'Échec au crime. La police et Échec au crime ont tous deux admis ne pas avoir suivi les procédures normales de vérification dans ce cas, et tous deux ont depuis collaboré à l'élaboration de mesures visant à prévenir des situations semblables. La banque a aussi mis en ouvre des changements de procédure pour vérifier les heures des bandes vidéo de surveillance et des bandes journal.

Conclusions du commissaire

Rendues le 28 juin 2002

Compétence : Depuis le 1er janvier 2001, la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques s'applique aux entreprises fédérales. Le commissaire a compétence parce que les banques sont des entreprises fédérales selon la définition de la Loi.

Application : Le principe 4.6 de l'annexe 1 énonce que les renseignements personnels doivent être aussi exacts, complets et à jour que l'exigent les fins auxquelles ils sont destinés. Le principe 4.6.1 énonce que le degré d'exactitude et de mise à jour ainsi que le caractère complet des renseignements personnels dépendront de l'usage auquel ils sont destinés, compte tenu des intérêts de la personne; et que ces renseignements doivent être suffisamment exacts, complets et à jour pour réduire au minimum la possibilité que des renseignements inappropriés soient utilisés pour prendre une décision au sujet de la personne.

Le commissaire a fait remarquer que personne n'a contesté que l'image de la plaignante ait été filmée par la caméra de surveillance vidéo de la banque, qu'une erreur ait été commise lors de l'appariement des images vidéo avec les heures des transactions de la bande journal, et que, par conséquent, la plaignante avait été identifiée publiquement et faussement comme suspecte. Quoique convaincu que la banque avait l'obligation d'aider la police dans le cadre d'une enquête criminelle en communiquant des renseignements personnels sous forme de photographies tirées de bandes vidéo de surveillance, il a établi que les renseignements ainsi communiqués dans cette cause étaient extrêmement inexacts, puisque la banque n'en avait pas vérifié l'exactitude.

Pour ce qui est du principe 4.6, le commissaire devait considérer quels auraient dû être l'exactitude des renseignements et le niveau de diligence de la banque lors de la vérification de l'exactitude. Il a établi ce qui suit :

  • Le but de la communication des renseignements était de résoudre un crime - un but qui de toute évidence ne peut être atteint avec des renseignements complètement inexacts.
  • L'exactitude étant de première importance dans l'atteinte de ce but, la banque aurait dû veiller à ce que les renseignements soient aussi exacts que possible.

Le commissaire a conclu que la banque, ayant manifestement omis d'assurer l'exactitude des renseignements, a clairement contrevenu au principe 4.6.

Pour ce qui est du principe 4.6.1, le commissaire a noté que l'organisation doit bien tenir compte des conséquences possibles de renseignements inexacts sur une personne. Il a établi ce qui suit :

  • Les renseignements personnels communiqués de façon inappropriée par la banque ont servi à prendre une décision au sujet de la plaignante - en particulier, une décision erronée selon laquelle elle devait être recherchée en tant que suspecte principale d'un crime.
  • La plaignante a été humiliée et s'est inquiétée de sa réputation et de son gagne-pain en raison de cette décision.
  • Sachant bien que la police se servirait probablement des renseignements personnels de la plaignante pour la soupçonner d'un crime, la banque aurait dû prendre soin de veiller à l'exactitude de ces renseignements afin de réduire la possibilité d'une mauvaise décision aux conséquences défavorables.
  • Il n'y a pas eu diligence raisonnable.

Le commissaire a conclu que la banque a aussi contrevenu au principe 4.6.1.

Il a conclu que la plainte était fondée.

Autres considerations

Dans ses lettres de conclusion, le commissaire a fait remarquer qu'il était convaincu que la banque avait depuis pris les mesures appropriées pour se conformer aux principes pertinents et empêcher que de semblables événements ne se reproduisent. Il a aussi fait remarquer que la plaignante était satisfaite des mesures de correction prises par la banque et les autres organismes en cause et avait été rassurée de connaître l'étendue et la nature de l'utilisation de ses images photographiques.

Date de modification :