Un aéroport doit modifier ses procédures de traitement des demandes de tiers concernant la vidéosurveillance exercée dans son aérogare afin de se conformer au paragraphe 7(3) de la LPRPDE
Résumé de conclusions d'enquête en vertu de la LPRPDE no 2015-004
Le 13 août 2015
Leçons apprises
- Les organisations qui détiennent des renseignements personnels obtenus au moyen de leurs activités de vidéosurveillance doivent veiller à ne pas communiquer cette information à des tiers à l’insu de l’intéressé et sans son consentement. Par ailleurs, la LPRPDE prévoit des situations où il n’est pas nécessaire d’informer un individu ou d’obtenir son consentement avant de communiquer des renseignements personnels, notamment lorsque la communication est exigée par assignation (alinéa 7[3]c]) ou que la demande est faite par une institution gouvernementale ayant l’autorité légitime étayant son droit d’obtenir l’information et que d’autres conditions sont remplies (sous-alinéa 7[3]c.1]).
- Avant de communiquer des renseignements personnels à l’insu de l’intéressé ou sans son consentement en vertu de l’alinéa 7[3]c] ou du sous-alinéa 7[3]c.1]), les organisations doivent s’assurer que les exigences particulières des dispositions en question ont été respectées.
- Les renseignements personnels devraient être communiqués en vertu de l’alinéa 7(3)c) uniquement lorsque leur communication est manifestement exigée par assignation, mandat ou ordonnance d’un tribunal.
Plainte
Une femme a déposé une plainte alléguant qu’un aéroport canadien avait communiqué à un tiers, à son insu et sans son consentement, des renseignements personnels la concernant sous forme d’images de vidéosurveillance.
Résumé de l’enquête
À la suite d’un accident du travail, la plaignante a commencé à toucher des prestations régulières de l’organisme gouvernemental de sa province qui indemnise les accidentés du travail. Après avoir commencé à verser les prestations, l’organisme a décidé de faire enquête pour déterminer si les blessures subies par la plaignante étaient aussi invalidantes qu’elle l’affirmait.
Sachant que la plaignante avait entrepris un voyage à partir de son aéroport local, l’organisme a communiqué avec le bureau de la sécurité de l’aéroport pour demander à avoir accès aux images de vidéosurveillance captées le jour de son départ.
L’organisme a délivré une assignation enjoignant aux autorités aéroportuaires de lui remettre les images de surveillance captées le jour du départ de la plaignante. Les autorités aéroportuaires ont acquiescé pleinement à la demande.
Plusieurs jours plus tard, prévoyant que la plaignante reviendrait à l’aéroport à la fin de son voyage, l’organisme a pris des dispositions pour qu’un employé de la sécurité de l’aéroport la filme au moyen d’une caméra de vidéosurveillance au moment où elle récupérerait ses bagages. Les images ont ensuite été transmises à l’organisme. Celui-ci n’avait délivré aucune assignation pour les obtenir, mais il avait présenté les formulaires de demande d’information fournis par l’aéroport avant que les images lui soient communiquées.
Plusieurs mois plus tard, en lisant le rapport d’enquête final produit par l’organisme, la plaignante a appris que les autorités aéroportuaires avaient communiqué des images d’elle captées à l’aide d’une caméra de vidéosurveillance. Alléguant que ces images avaient été captées à son insu et sans son consentement, elle a déposé une plainte contre l’aéroport auprès du Commissariat. Nous avons reçu la plainte et commencé à l’examiner.
Les autorités aéroportuaires ont affirmé que les images de vidéosurveillance ne contenaient pas de renseignements personnels de la plaignante, puisque les vidéocaméras étaient à la vue de tous et que les images étaient captées dans un lieu public. Selon elles, même si les images contenaient des renseignements personnels protégés en vertu de la Loi, il n’était pas nécessaire d’obtenir le consentement de la plaignante pour les communiquer, ni la première fois ni la seconde, puisque les exceptions au consentement prévues à l’alinéa 7(3)c) et au sous-alinéa 7(3)c.1) s’appliquaient. Ces dispositions énoncent ce qui suit :
L’alinéa 7(3)c) autorise la communication de renseignements personnels sans le consentement de l’intéressé lorsque la communication est exigée par assignation, mandat ou ordonnance d’un tribunal, d’une personne ou d’un organisme ayant le pouvoir de contraindre à la production de renseignements ou exigée par des règles de procédure se rapportant à la production de documents.
Le sous-alinéa 7(3)c.1) n’exige pas d’assignation, de mandat ni d’ordonnance, mais exige plutôt que la communication soit faite à une institution gouvernementale ou à une subdivision d’une telle institution i) qui a demandé à obtenir le renseignement; ii) en mentionnant la source de l’autorité légitime étayant son droit de l’obtenir; ou iii) en mentionnant le fait que la communication était demandée à certaines fins autorisées, par exemple l’administration ou l’application du droit canadien ou provincial.
Les autorités aéroportuaires ont fait valoir que l’assignation les contraignant à remettre à l’organisme les images vidéo enregistrées le jour du départ de la plaignante s’appliquait aussi, en vertu de l’alinéa 7(3)c), aux images captées le jour du retour. Selon elles, les images captées au retour de la plaignante constituaient la suite et le suivi de l’enquête dont elle faisait l’objet et se rapportaient au même voyage.
Enfin, les autorités aéroportuaires ont affirmé qu’elles pourraient également invoquer l’exception au consentement prévue au sous-alinéa 7(3)c.1), qui n’exige pas d’assignation, de mandat ou d’ordonnance.
Résultat
Le Commissariat a déterminé que les images vidéo où l’on voyait la plaignante constituaient des renseignements personnels la concernant, en dépit du fait que la surveillance ait été exercée dans un lieu public. La Loi n’exclut pas de son champ d’application les renseignements personnels saisis par vidéocaméra dans un lieu public.
Le Commissariat a examiné les images enregistrées le jour du départ de la plaignante et celui de son arrivée, qui avaient été communiquées à l’organisme. Dans les images enregistrées le jour du départ, on ne voyait pas bien la plaignante. Quoi qu’il en soit, le Commissariat a jugé que la communication était acceptable en vertu de l’alinéa 7(3)c) puisque l’organisme avait le pouvoir de délivrer une assignation et que les images du départ constituaient des renseignements à communiquer en vertu de l’assignation.
Toutefois, en ce qui a trait à la communication par les autorités aéroportuaires des images captées le jour du retour de la plaignante, le Commissariat a jugé que les enregistrements contenaient manifestement des images de la plaignante et que ni l’alinéa 7(3)c) ni le sous-alinéa 7(3)c.1) ne s’appliquaient dans les circonstances, pour les raisons énoncées ci-après :
- En ce qui concerne l’alinéa 7(3)c), la seule assignation délivrée par l’organisme se limitait clairement à la production d’enregistrements concernant le départ de la plaignante.
- En ce qui concerne le sous-alinéa 7(3)c.1), les critères d’exception n’ont pas été respectés. D’abord, les formulaires de demande d’information présentés par l’organisme ne faisaient aucunement état de l’autorité légitimeNote de bas de page 1 étayant son droit d’obtenir l’information sans avoir à délivrer d’assignation. Ensuite, ces formulaires mentionnaient uniquement, par erreur, le vol de départ de la plaignante et non son vol de retour. L’information communiquée à l’organisme ne correspondait donc pas à la demande.
À l’issue de notre enquête, nous avons recommandé que les autorités aéroportuaires mettent en place des procédures et des pratiques aux fins de l’application du paragraphe 7(3) et donnent aux employés la formation requise à cet égard. Nous avons également recommandé que ces autorités soient dorénavant tenues de s’assurer que les renseignements personnels communiqués se limitent à la teneur de l’assignation, du mandat ou de l’ordonnance. Enfin, nous avons recommandé que les autorités aéroportuaires s’assurent que toutes les conditions du sous-alinéa 7(3)c.1) sont respectées lorsqu’elles invoquent cette disposition.
Les autorités aéroportuaires ont accepté de mettre en œuvre nos recommandations dans le délai imparti. Nous avons jugé que la plainte est fondée et conditionnellement résolue. Depuis la fin de l’enquête, le Commissariat a confirmé que ses recommandations avaient été mises en œuvre.
Notes
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