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Une mère et sa fille sont filmées pendant la surveillance secrète d’une autre personne

Résumé de conclusions d’enquête en vertu de la LPRPDE no 2009-007

[Principes 4.1.4(a), 4.3, 4.4 et 4.4.1; alinéas 7(1)b) et 7(2)d)]

Leçons apprises

  • Il faut obtenir le consentement de la personne concernée avant de recueillir des renseignements personnels à son sujet, sauf si une exemption de la Loi est applicable.
  • Afin de limiter la collecte de renseignements personnels, les objectifs de cette collecte doivent être clairement définis au préalable.
  • Les renseignements personnels qui sont recueillis sans le consentement de la personne concernée, et qui ne sont pas nécessaires aux fins mentionnées doivent être anonymisés ou détruits dès que possible, sauf si une exemption de la Loi est applicable.

Une femme et sa fille ont été étonnées d’apprendre qu’elles avaient été dans un lieu public dans le cadre d’une opération de vidéosurveillance secrète visant la sœur de la femme en question. La vidéosurveillance secrète avait été demandée par la compagnie d’assurances de la sœur en raison d’un conflit juridique en cours. La femme a déposé une plainte contre l’agence d’enquête privée à laquelle la compagnie avait fait appel pour enquêter sur sa sœur.

Après avoir enquêté sur la plainte, la commissaire adjointe à la protection de la vie privée a fait plusieurs recommandations à l’agence d’enquête privée concernant la collecte et l’utilisation de renseignements personnels dans le cadre de la vidéosurveillance secrète, y compris les renseignements personnels de tierces parties, conformément à la Loi.

Bien qu'il ait accepté de mettre en œuvre certaines recommandations, l’enquêteur privé n’a pas accepté de donné suite à toutes les recommandations. Il a affirmé qu’il continuerait à recueillir, utiliser et communiquer les renseignements personnels de tierces parties sans leur consentement, même quand l’alinéa 7(1)b) de la Loi ne s’applique pas. Il a également refusé d’anonymiser ou de supprimer les renseignements de tierces parties recueillis sans leur consentement.

La commissaire adjointe a conclu que la collecte des renseignements de tierces parties effectuées sans le consentement de celles‑ci au moyen de caméras de surveillance secrètes pourrait être acceptable aux termes de l’alinéa 7(1)b) de la Loi dans certaines situations particulières. (Par exemple, quand il est possible de démontrer qu’une telle collecte s’avère pertinente aux fins de la collecte de renseignements concernant la personne qui fait l’objet de la surveillance.) Cependant, la commissaire adjointe estime que les circonstances particulières du cas de la plaignante n’entrent pas dans cette catégorie.

Voici un aperçu de l’enquête et des conclusions de la commissaire adjointe.

Résumé de l’enquête

La sœur de la plaignante a fait l’objet d’une vidéosurveillance secrète réalisée par une agence d’enquête privée engagée par l’assureur de la sœur de la plaignante. La sœur de la plaignante a été impliquée dans un accident de la route il y a de cela plusieurs années, et au moment de l’enquête secrète à son sujet, elle avait engagé une poursuite contre son assureur au sujet des prestations qu’elle recevait.

La plaignante a appris l’existence d’un rapport de surveillance concernant sa sœur qui contenait des renseignements sur ses propres activités et sur celles de sa fillette, son numéro de plaque d’immatriculation ainsi que des photographies et des vidéos d’elle et de sa fille. Cependant, ni la plaignante ni sa fille n’avaient consenti à être photographiées.

L’assureur a admis au Commissariat que les images de la plaignante et de sa fille avaient été prises par inadvertance, et que le but de l’enquête et de la surveillance secrètes n’a jamais été de recueillir des renseignements à leur sujet. De plus, l’assureur et l’enquêteur privé ont admis qu’ils n’avaient pas de politique organisationnelle traitant des problèmes liés à la collecte accidentelle d’information sur des personnes ne faisant pas l’objet d’une enquête.

L’agence d’enquête privée a défendu ses actes. Selon elle, la Loi ne s’applique pas aux circonstances liées au cas de la plaignante, la Loipermet la collecte de renseignements personnels sans le consentement de l’intéressé si la collecte est raisonnable à des fins liées à une enquête sur la violation d’un accord ou la contravention du droit [alinéa 7(1)b)], et il n’est pas raisonnable de s’attendre ce qu’on obtienne le consentement de toutes les parties dont les renseignements personnels ont été enregistrés sur une bande vidéo dans le cadre d’une enquête. L’enquêteur a également refusé de brouiller l’image des personnes qui étaient accidentellement filmées au cours d’une vidéosurveillance.

La commissaire adjointe n’était pas du même avis et a fait plusieurs recommandations. Premièrement, elle a demandé que l’enquêteur privé cesse de recueillir des renseignements personnels à moins que l’alinéa 7(1)b) ne s’applique; ensuite, qu’il anonymise le plus rapidement possible les renseignements personnels recueillis, ou qu’il les supprime, à moins que l’alinéa 7(1)b) ne s’applique. Elle a également recommandé à l’agence d’intégrer des procédures et des politiques précises à sa politique de confidentialité — se conformant ainsi comme il se doit à l’annexe 1 de la Loi— en ce qui concerne la collecte, l’utilisation et la communication des renseignements personnels obtenus dans le cadre d’une surveillance secrète, y compris les renseignements personnels non pertinents de tierces personnes. La commissaire adjointe a également recommandé à l’agence de prévoir une formation sur ces nouvelles politiques et procédures pour ses employés et ses sous-traitants.

Enfin, à titre de pratique exemplaire, elle a proposé que l’enquêteur privé documente ses dossiers lorsqu’il invoque l’alinéa 7(1)b) pour recueillir des renseignements personnels sans le consentement de l’intéressé.

En réponse à ces recommandations, l’enquêteur privé a accepté d’informer le Commissariat lorsqu’une formation sera donnée à ses employés et à ses sous-traitants. En réponse à la pratique exemplaire proposée, le mis en cause a accepté de documenter de façon adéquate ses dossiers lorsqu’il recueillera des renseignements personnels sans le consentement de la personne concernée en invoquant l’alinéa 7(1)b).

En revanche, il a répondu qu’il ne réviserait pas ses politiques et ses procédures de confidentialité en matière de surveillance vidéo pour les rendre conformes aux principes énoncés à l’annexe 1 de la Loi. Il a affirmé qu’il modifierait plutôt sa politique de confidentialité afin d’autoriser les collectes de renseignements personnels de tierces parties qui sont raisonnables dans les circonstances. En outre, il continuera à recueillir, utiliser et communiquer des renseignements personnels de tierces parties sans leur consentement, que l’alinéa 7(1)b) s’applique ou non. Le mis en cause a également refusé d’anonymiser (c.-à-d. de brouiller les images) ou de supprimer les renseignements personnels de tierces parties recueillis sans leur consentement.

Conclusions

Rendues le 4 mai 2009

Application : Le principe 4.3 stipule qu’une personne doit être informée de toute collecte, utilisation ou communication de renseignements personnels qui la concernent et y consentir, à moins qu’il ne soit pas approprié de le faire. L’alinéa 7(1)b) stipule qu’une organisation peut procéder à la collecte de renseignements personnels à l’insu de l’intéressé et sans son consentement s’il est raisonnable de s’attendre à ce que la collecte effectuée au su ou avec le consentement de l’intéressé puisse compromettre l’exactitude du renseignement ou l’accès à celui-ci, et la collecte est raisonnable à des fins liées à une enquête sur la violation d’un accord ou la contravention du droit fédéral ou provincial. En vertu de l’alinéa 7(2)d), une organisation peut utiliser des renseignements personnels à l’insu et sans le consentement de l’intéressé s’ils ont été recueillis au titre de l’alinéa 7(1)b). Le principe 4.1.4(a) indique que les organisations doivent assurer la mise en œuvre des politiques et des pratiques destinées à donner suite aux principes, y compris la mise en œuvre des procédures pour protéger les renseignements personnels. Le principe 4.4 stipule que l’organisation ne peut recueillir que les renseignements personnels nécessaires aux fins déterminées et doit procéder de façon honnête et licite. Le principe 4.4.1 précise que les organisations ne doivent pas recueillir des renseignements de façon arbitraire. On doit restreindre tant la quantité que la nature des renseignements recueillis à ce qui est nécessaire pour réaliser les fins déterminées.

Pour rendre sa décision, la commissaire adjointe s’est appuyée sur les considérations suivantes :

  • Les principes 4.4 et 4.4.1 stipulent que l’organisation ne peut recueillir que les renseignements personnels nécessaires aux fins déterminées. Dans le cas qui nous intéresse, l’assureur a admis que la plaignante et sa fille n’étaient pas concernées par l’opération de surveillance. Leurs renseignements personnels avaient donc été recueillis par inadvertance. Après avoir recueilli les renseignements, l’enquêteur privé n’a pas supprimé ou anonymisé les renseignements personnels non pertinents de la bande vidéo de surveillance, et, de plus, a refusé d’appliquer la recommandation que le Commissariat a formulée à cet effet dans le cadre des prochaines collectes de renseignements non pertinents. Par conséquent, le principe 4.4.1 n’a pas été respecté.
  • Pour ce qui est du consentement, la commissaire adjointe a reconnu que, parfois, la collecte de renseignements personnels d’une tierce personne sans son consentement, au moyen de caméras de surveillance, peut être jugée raisonnable. Par exemple, dans des situations où l’organisation a des raisons de croire que la collecte de renseignements concernant la tierce partie est pertinente aux fins de la collecte de renseignements sur la personne en cause. Toutefois, cela ne s’applique pas à la situation qui nous intéresse, étant donné que les renseignements de la plaignante n’étaient pas pertinents aux fins de l’opération de surveillance secrète. Par conséquent, l’alinéa 7(1)b) ne pouvait pas s’appliquer et le consentement de la plaignante était manifestement nécessaire. Étant donné que le consentement de la plaignante n’a pas été obtenu, la commissaire adjointe a conclu qu’il y a eu contravention au principe 4.3.
  • En ce qui a trait à ses obligations, en vertu du principe 4.1.4(a), visant la mise en œuvre de procédures destinées à protéger les renseignements personnels, le mis en cause a refusé de suivre la recommandation de la commissaire adjointe voulant que ses politiques, directives et procédures de confidentialité en matière de surveillance secrète soient modifiées afin de tenir compte des principes énoncés à l’annexe 1 de la Loi. Par conséquent, le principe 4.1.4(a) n’a pas été respecté.

Conclusion

La commissaire adjointe a donc conclu que la plainte était fondée.

Autre

La commissaire adjointe a demandé à l’enquêteur privé de détruire tous les renseignements personnels qu’il a recueillis sur la plaignante et sa fille.

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